Un an après le tremblement de terre : une réponse post-séisme axée sur le potentiel des acteurs locaux

Par l’équipe de l’Unité Résilience du PNUD en Haïti

13 août 2022
Un groupe de jeunes femmes en train de mener des activités de peinture avec l'appui du PNUD

Un groupe de jeunes femmes en train de mener des activités de peinture avec l'appui du PNUD

Crédit photo : PNUD Haïti

Samedi 14 août 2021, un séisme de magnitude 7,2 a secoué la péninsule Sud d’Haïti vers 8h30 heure locale, provoquant la mort de plus de 2000 personnes, des milliers de blessés et d’importants dégâts matériels liés à l’effondrement d’immeubles et au blocage de routes. Une catastrophe naturelle rappelant le choc vécu lors du tremblement de terre survenu en janvier 2010 et qui a été suivie par la dépression naturelle Grace.

Haïti a capitalisé sur les leçons apprises en 2010. En 2021, le pays était mieux préparé. Le jour même du tremblement de terre, le gouvernement, à travers le Système National de Gestion des Risques et des Désastres, a eu recours à son mécanisme principal d’action pour le relèvement en activant le Centre d’Opérations d’Urgence Nationale (COUN) et le Centre d’Opérations d’Urgence Départemental (COUD). Pour sa part, le PNUD sest positionné aux côtés du gouvernement haïtien au niveau national et départementale (Sud, Nippes, GrandAnse) à peine quelques minutes après l’incident, démarrant ainsi la planification de la réponse post-séisme.

La logistique suite aux catastrophes naturelles : une ligne d’action sous-estimée or essentielle

Malheureusement, depuis au moins deux ans, le Grand Sud connait des périodes d’isolation du reste du pays dû à l’insécurité et aux crises de carburant. Une dynamique qui tend à rendre cette partie du pays encore plus vulnérable. Alors, lors des livraisons de matériels ou de l’aide humanitaire, la région et la Route Nationale 2 ont connu des attaques et des scènes de pillage sur les véhicules. Cela affecte la chaîne dapprovisionnement des entreprises et des acteurs humanitaires dans le pays, mais surtout impacte négativement les populations locales. De plus, ceci venait s’ajouter au fait que lensemble des routes inter-municipales se trouvent dans la précarité (mauvais état des chaussées, manque dasphalte, sinuosité considérable du parcours). Voici deux défis de taille pour le relèvement post-séisme.

Le 14 août 2021, nous nous sommes donc posés la question : comment subvenir aux besoins des populations affectées par cette catastrophe naturelle et par la violence des groupes armés ? Ces personnes étaient doublement vulnérables et nous ne pouvions pas les laisser de côté.

Heureusement, une trêve a pu être négociée avec des groupes armés et des négociations faites avec les communautés sur la voie vers le Grand Sud. Ceci a abouti à l’annonce d’un couloir humanitaire temporaire. Cet accord a permis au PNUD d’assurer le transport des cadres sur le terrain en assurant les aspects logistiques (personnel, véhicules, essence, sécurité).
 

Arrivés sur le terrain : appui aux opérations de sauvetage et évaluation des risques

Sur le terrain, les équipes locales du PNUD ont constaté l’entre-aide citoyenne. Grâce aux leçons tirées d’autres catastrophes naturelles du passé, les gens ont su réagir plus vite et de façon efficace. Par exemple, nous avons témoigné de la générosité d’un groupe de citoyens anonymes qui voyageaient en voilier vers une zone difficile d’accès pour apporter des fruits, des bananes et des arbres véritables à ses résidents.

Touchés par cet esprit de collaboration, nous avons appuyé nos partenaires sur le terrain dans la coordination des opérations de sauvetage, notamment la Direction Générale de la Protection Civile d’Haïti (DGPC). L’intervention programmatique du PNUD post-séisme a commencé dans les trois départements touchés, de concert avec les institutions municipales. Nous avons mené des actions de coordination, de relèvement économique et d’évaluation des risques.

Un des problèmes principaux dans les zones affectées était l’accumulation de débris dans les rues. Dans le but de donner une solution à cette réalité, nous avons appuyé les mairies dans l’organisation d’activités de ramassage de débris. En fait, dans la commune de Maniche, nous avons accompagnés des équipes de volontaires qui ont même utilisé les débris empilés pour cimenter la route municipale.
 

Miser sur les communautés locales pour appuyer leur résilience post-séisme

Conscients du besoin d’éduquer les communautés pour les inclure dans la réponse post-séisme, nous avons organisé des sessions d'information et d'éducation sur les risques au niveau des communautés et des écoles locales. Or, cette ligne d’action a été fortement entravée par les pénuries d’essence répandues sur le territoire haïtien.

Par ailleurs, l’équipe du PNUD a détecté le besoin de contribuer au relèvement économique local en créant des emplois pour les personnes atteintes plus sévèrement par le séisme. Ainsi, l’initiative ‘’Cash for work’’ a embauché plus de 1000 personnes de manière temporelle (au moins 24 jours) dédiées au déblaiement et à l’assainissement des villes. Le soutien financier donné à 60 entreprises (20 par département touché) investies dans l’agro-alimentation, l’artisanat, la couture ou la restauration vise également cet épanouissement des micro-entreprises locales dans les zones affectées.

Cependant, notre engagement envers les populations les plus vulnérables nous demandait de mettre l’accent sur ces localités à long terme. Nous avons réfléchi autour de la question de l’autonomisation des femmes, qui perdent souvent leurs emplois à cause de l’impact des séismes et sur qui repose la plupart du travail domestique. En mai 2022, ce désir est devenu réalité à travers l’initiative ‘’Yes! She Paints’’, appuyant 60 femmes ayant le potentiel de réduire le déficit de bras féminin dans les métiers manuels en Haïti. Puis, les formations en employabilité, en peinture de bâtiments ou en respect écologique se sont succédées, des enseignements qui seront accompagnés d’un suivi pour assurer la continuité de ces activités d’entreprenariat. 

C’est cette implication auprès des populations qui a réveillé la reconnaissance des institutions locales qui, malgré nos ressources limitées, ont apprécié nos efforts après plusieurs mois. Les maires et les mairesses remarquent ‘’vous n’avez pas attendu qu’on se rapproche de vous pour nous contacter, vous étiez là depuis le début’’, ce qui redouble nos envies de soutenir la population.

Les réponses aux catastrophes naturelles sont toujours complexes et demandent des efforts soutenus à travers les années, d’autant plus dans un pays en voie de développement comme Haïti dont la structure économique est faible et les maux sociaux comme l’insécurité sont palpables. Or, la résilience ne veut pas forcément dire être inébranlable, le concept signifie plutôt raccourcir le temps qu’une nation prend pour se relever après un tel évènement. Dans ce sens, l’impact des opérations de coordination et le renforcement de la mobilisation citoyenne constatés cette année représentent des progrès par rapport aux crises précédentes. Cela nous semble un premier pas en avant qui apporte du sens à notre travail de dynamisation du développement en Haïti.