Que faire face à la destruction progressive des écosystèmes naturels au Togo

Il est impressionnant. Il a un corps majestueux pesant des tonnes, des oreilles larges pareilles à des éventails géants faisant étonnement des mouvements de va-et-vient avec une souplesse d'un martin-pêcheur, de grands pieds faisant resonner le sol tel un tambour. Chaque année à la même période, la saison des mangues, il vient passer quelque moment festif avec les gardiens du parc. Ces gardes forestiers sont devenus pour ainsi dire ses amis saisonniers. Il vient toujours seul. Fait-il parti d'un troupeau ou est-il isolé, personne n'a jamais poussé plus loin la curiosité. Ce pachyderme fait partie des centaines d'éléphants, peut-être davantage, on ne saurait le dire, qui vivent naturellement dans le parc Fazao Malfakassa, au Togo.

22 janvier 2024

La flore togolaise va d'une forêt tropicale dense à la savane éclairée, en passant par des mangroves dans la zone côtière

UNDP Togo/Acclab

Le parc Fazao Malfakassa, un noyau naturel

Niché au cœur du Togo, le parc Fazao-Malfakassa est une pépite naturelle où la faune et la flore déploient une beauté extraordinaire. Il se situe dans la chaine montagneuse de l’Atakora, une chaine qui traverse le Benin par le nord, le centre du Togo et fini sa course au Sud du Ghana. Ce sanctuaire, véritable joyau de la biodiversité togolaise, abrite une variété impressionnante d'espèces animales et végétales. Les majestueuses collines et les forêts luxuriantes du parc créent un paysage d'une rare splendeur. On y trouve une panoplie d'oiseaux, des singes joueurs, des antilopes gracieuses, etc. La richesse florale du parc, avec ses orchidées délicates, ses lianes majestueuses et ses arbres géants, crée une voile verdoyante. Le parc Fazao-Malfakassa est bien plus qu'une réserve naturelle ; c'est un tableau vivant où la faune et la flore togolaises s'épanouissent dans toute leur splendeur.

La faune et la flore togolaise

La flore togolaise va d'une forêt tropicale dense à la savane éclairée, en passant par des mangroves dans la zone côtière. Pour la préservation de cette diversité, 83 parcs nationaux ont été créés.

Ces parcs sont aujourd'hui le sanctuaire de la biodiversité. On y trouve :

  • Des mammifères tels que les singes, les hyènes, les lions, les antilopes, les buffles, les hippopotames, les éléphants de forêt, les pangolins, les léopards, des chimpanzés, pour ne citer que ceux-là; 

  • Des oiseaux : les rapaces, les perroquets, les toucans, les aigles, les hérons et de nombreuses autres espèces;

  • Des serpents, les lézards et les tortues, les grenouilles et les crapauds;

  • Et les insectes : papillons, fournis ; 

  • Des arbres majestueux comme l'iroko, le teck, le kapokier, le baobab, des palmiers…

  • La mangrove dans la zone côtière.

Ces sanctuaires de biodiversité ont toujours fait l'objet d'une grande attention. Ainsi, plusieurs efforts sont consentis pour leur préservation et protection. Par exemple, les parcs de Togodo et de Fazao Malfakassa qui sont dans le champ de mire du Laboratoire d'Accélération pour une approche innovante de protection et de préservation, dispose des brigades et du personnel.

Ces gardes forestiers et les écogardes font un travail remarquable, quelquefois au risque de leur vie, pour la protection de ces grands espaces naturels. Beaucoup est fait pour la sauvegarde de la biodiversité mais le chemin est encore long pour faire de ces espaces des musées naturels de l'écosystème, des espaces économiquement fiables et durables.

 

Importance des parcs naturels

Ces parcs qui sont en majorité des forêts jouent un rôle essentiel dans l'équilibre de la planète et offrent de nombreux avantages économiques, environnementaux et sociaux. Ils participent à la conservation de la biodiversité, la régulation du climat, la protection des sols, l'approvisionnement en eau douce, la fourniture de produits forestiers, l'écotourisme et loisirs, la culture et tradition, l'emplois et économie, l'amélioration de la qualité de l'air, etc. Malheureusement ces écosystèmes naturels font aujourd'hui face à d'énormes défis.

Les défis des aires protégées togolaises

Des visites immersives conjointes, ministère de l'environnement et des ressources forestières et le Laboratoire d'Accélération du PNUD, ont permis de constater la pression énorme et sans précédente qui s’exerce sur ces joyaux naturels et indispensables à la vie. En effet, ils font face à plusieurs défis, notamment : 

  • Le braconnage : La quête de gibier, la collecte d'objets d'origine animale pour des pratiques de médecine traditionnelle, ainsi que la recherche de produits exotiques motivent les braconniers à entrer illégalement dans ces espaces protégés et tuer sans distinction les animaux sauvages.

  • La transhumance : Faute d'une délimitation marquée des couloirs de transhumance, les bergers entrent avec leurs bêtes dans les parcs pour les faire boire et manger. Ils menacent quelquefois les écogardes dépourvus de moyen. 

  • La déforestation et la dégradation :  Des réseaux de trafiquants de bois s'introduisent dans les forêts à la recherche des spécimens. Par endroit, il est observé une érosion progressive des lisières des parcs pour des besoins en terres agricoles.  Pour les besoins en bois de chauffe, en bois d’œuvre et les produits de la médecine traditionnelle, certains individus s'introduisent frauduleusement dans les parcs pour en couper.

  • L’aménagement du parc : Le manque de pistes forestières aménagées, surtout de pistes périmétrales, rend difficiles les opérations de patrouilles. Cette situation constitue une aubaine pour les braconniers, transhumants et malfrats. Le côté Est du parc de Togodo-Sud constitue un exemple palpable où l’inexistence de pistes périmétrales le long du fleuve Mono, frontière naturelle avec la république du Bénin, favorise la traversée du fleuve à pirogues par des délinquants qui viennent s’introduire dans le parc pour y mener leurs activités illicites sans grande inquiétude.  

  • Les moyens logistiques : pour une surveillance efficace de ces vastes espaces, il faut du matériel roulant adapté. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui où les écogardes utilisent leurs propres moyens de bord. En plus, certaines des brigades méritent d'être renforcées et mieux équipés en service de base (électricité, eau…) pour offrir des meilleures conditions de travail.

  • Le personnel : il est insuffisant pour couvrir l'espace. Le parc de Togodo Sud est servi par trois employés, appuyés par 25 pisteurs volontaires occasionnels pour une superficie de 15000 hectares.  Le conservateur de Fazao Malfakassa gère également une équipe d'écogardes volontaires au nombre de 64 repartis dans 10 brigades sur les 192 000 hectares.

Face à cette situation, une action concertée, coordonnée et cohérente s'avère nécessaire. Une collaboration entre les différents acteurs est indispensable pour la préservation de ce patrimoine naturel. Ceci implique une gestion durable des ressources forestières, des mesures de protection, la promotion de pratiques agricoles durables, la participation des communautés locales dans la gestion des forêts, le développement de l'écotourisme, entre autres mesures.

Quelles solutions pour contrer la dégradation de l'écosystème naturel au Togo? 

La résolution de ces défis est existentielle pour ces joyaux naturels. C'est ainsi que le ministère veut non seulement renforcer la surveillance et la protection des parcs mais également améliorer la gestion pour les rendre économiquement rentable et leur assurer la pérennité.   

Mais par quel bout commencer ? Tout semble urgent. Cependant, il va sans dire qu'il faut protéger ce qui existe déjà.  L'utilisation de la technologie telle que le drone semble idoine.  Elle permettra de :

  • Surveiller la faune et la flore, détecter instantanément les incidents : cela est essentiel pour la lutte anti-braconnage, le trafic illégal de bois et d'autres activités illicites ;

  • Collecter des données détaillées et précises sur la végétation, les animaux, les insectes, le relief, les cours d'eau, etc. 

  • Suivre les changements environnementaux tels que l'érosion, la déforestation, la régénération forestière et les changements dans les cours d'eau, fournissant ainsi des données utiles pour la gestion des écosystèmes.

  • Couvrir de vastes zones de terrain, même des zones inaccessibles ou dangereuses pour les équipes de surveillance pédestre, en un temps relativement court

  • Localiser des incidents tels que les départs de feu ou les activités illégales, afin d'intervenir plus rapidement

  • Réduire les coûts en remplaçant les méthodes de surveillance traditionnelles plus coûteuses

Le laboratoire d'accélération veut contribuer en expérimentant avec le ministère de l'environnement et des ressources forestières cette nouvelle approche pour la surveillance, la préservation et la gestion de l'écosystème naturel.

Un dicton fait savoir : "Les solutions d'aujourd'hui sont les problèmes de demain". Comment éviter ce piège dans la gestion des parcs nationaux ?

Blog écrit par Yawo Agnigbankou

Head of Experimentation 

Face à cette situation, une action concertée, coordonnée et cohérente s'avère nécessaire. Une collaboration entre les différents acteurs est indispensable pour la préservation de ce patrimoine naturel. Ceci implique une gestion durable des ressources forestières, des mesures de protection, la promotion de pratiques agricoles durables, la participation des communautés locales dans la gestion des forêts, le développement de l'écotourisme, entre autres mesures.