Une performance de l’Indice de Développement Humain (IDH), ternie par la persistance des inégalités de genre en Côte d’Ivoire.

La problématique de l’Egalité des sexes et de l’autonomisation de la femme, retenue comme un des objectifs de développement durable pour l’humanité, est au cœur de la vision des Nations Unies et de l’Union Africaine qui l’ont inscrite au nombre des priorités pour la réalisation de leurs différents agendas (2030 et 2063).

6 septembre 2023
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La problématique de l’Egalité des sexes et de l’autonomisation de la femme, retenue comme un des objectifs de développement durable pour l’humanité, est au cœur de la vision des Nations Unies et de l’Union Africaine qui l’ont inscrite au nombre des priorités pour la réalisation de leurs différents agendas (2030 et 2063). En effet, il est de plus en plus reconnu que pour bâtir des sociétés plus inclusives, productives et plus respectueuses de l’environnement, il est indispensable de mieux protéger et investir dans le potentiel que représentent les filles et les femmes et de combattre les discriminations fondées sur le genre. La Côte d’Ivoire a très bien compris que pour accélérer sa transformation structurelle qui lui permettra de se hisser dans la tranche des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici à 2025, la prise en compte de la dimension genre reste capitale. Aussi, le pays a ratifié la plupart des instruments internationaux et régionaux reconnaissant aux femmes et aux hommes, l’égalité en droits et en devoirs, et interdisant toute discrimination à l’égard des femmes. L’Etat s’est également attelé à l’améliorer son cadre législatif et institutionnel pour une prise en compte efficace du genre. Ainsi, plusieurs actions en faveur de la réduction des inégalités entre les hommes et les femmes ont été prises et notamment l’adoption des politique, stratégies, et différentes lois. 


Le pays a également inscrit sa croissance économique et son progrès social dans une dynamique d’un meilleur partage des richesses, de positionnement du genre de manière transversale dans tous les plans, programmes et politiques de développement. 


Dans ce combat en faveur de la promotion de l’égalité Homme-Femme, la Côte d’Ivoire bénéficie du soutien du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) - et des autres agences de la grande famille des Nations Unies -  qui a dans son rôle d’appui technique et financier, fait de la promotion de l’égalité de genre et de l’autonomisation des filles et des femmes, son cheval de bataille. Le PNUD a élaboré une stratégie spécifique sur le genre, qui est arrimée à son document de programme Pays (CPD 2021-2025) et obtenu en 2017 et 2023 la certification Or du Gender Equality Seal du PNUD, qui matérialise la reconnaissance de l’Organisation des efforts et bonnes performances du bureau Côte d’Ivoire en matière d’intégration du genre. 


Une performance de l’IDH contrariée par une persistance d’inégalités de genre


Le développement humain intéresse le PNUD au plus haut niveau, et l’une des contributions phares du PNUD sur ce sujet, reste la publication emblématique du Rapport sur le Développement Humain (RDH) depuis 32 ans. En effet, Les RDH  dressent chaque année à travers un thème spécifique un état des lieux des dimensions multisectorielles, en mettant en lumière les défis entravant le développement humain durable dans ses trois dimensions : Education, Santé, et Niveau de Revenu, qui servent de base au calcul de l’indicateur phare, l’IDH , généralement désagrégé en genre, avec l’Indice de Développement du Genre  (IDG) et complété par un indice  d’inégalité du genre (IIG), qui tous deux analysent les progrès des pays en matière de promotion de l’égalité Homme Femme.


Le rapport 2022 avec pour thème « Temps incertains, vies bouleversées : façonner notre avenir dans un monde en mutation », est le troisième et dernier volet d'une trilogie de rapports ayant débuté en 2019, et traitant des thèmes d’Inégalités, et d’Anthropocène. Le rapport révèle des préoccupations légitimes dans un monde incertain, volatile, complexe et ambigu.  Il indique que, pour la première fois depuis 32 ans, la Côte d’Ivoire est sortie de la catégorie des pays à IDH faible, pour rejoindre celle des pays à IDH moyen, avec un score d’IDH 0,550  en 2021, contre 0.538 en 2020.

Cette avancée reposerait entre autres sur la mise en œuvre réussie des différents PND (2012-2016, 2026-2020, 2021-2025), et des programmes, y inclus le programme phare du PS Gouv2, que le PNUD appuie effectivement à travers la mise en œuvre de son CPD 2021-2025. 


Si cette performance de la Côte d’Ivoire est fortement appréciée, force est de constater qu’elle n’est toujours pas mieux ventilée entre les sexes. En effet, L’indice de développement du genre, l’autre indice qui permet d’apprécier les performances en termes de développement humain entre sexe, met en relief le grand écart qui existe au niveau du revenu national brut par habitant des hommes et des femmes. 


La Côte d’Ivoire est toujours dans le groupe 5  des pays où le niveau d’égalité femmes-hommes dans l’IDH est bas : Les hommes (0.58) ont une légère avance sur les femmes (0.51). Cet écart est perceptible au niveau des différents indicateurs de l’IDH, où l’espérance de vie en années des femmes (59.9) est supérieure à celle des hommes (57.4), la durée moyenne de scolarisation en année pour les hommes (5.7) est supérieure d’un an à celle des femmes (4.7), tout comme la durée de scolarisation attendue en année pour les hommes (11.3) et celle des femmes (10), et le niveau de revenu moyen en parité de pouvoir d’achat des hommes (6643 $) est quasiment le double des femmes (3763$). Il ressort donc que les femmes passent toujours moins de temps en moyenne à l’école que les hommes ; vivent un peu plus longtemps que les hommes mais ont moins de revenu.


Quant à l’indice d’inégalité de genre (IIG), il convient de noter que les inégalités entre les femmes et les hommes persistent, et les déséquilibres planétaires, la pandémie de COVID-19, les crises économiques et autres chocs récents aggravent la situation des femmes dans le monde entier.  En Côte d’Ivoire, il   est en baisse passant de 0.638 en 2020 à 0.613 en 2021 (l’IIG s'échelonne de 0, où les femmes et les hommes sont égaux, à 1, où un des deux sexes est plus mal loti dans les dimensions mesurées). L’indice révèle un manque d’amélioration majeure dans ses différentes dimensions : i) un faible taux de représentativité parlementaire féminine 15.6%, ii) une existence d’écart de 9 points de pourcentage entre les hommes (32.2) et femmes (23.9) ayant commencé des études secondaires, un taux d’activité des 15 ans et plus en pourcentage, défavorable aux  femmes (45.9) avec (64.9) chez les hommes, iii) un taux de natalité toujours en hausse chez les adolescents de 15 à 19 ans (105 pour 1000 femmes), et un taux de mortalité maternelle encore élevé (617 pour 100 000  naissances). 


La Côte d’ivoire doit redoubler d’efforts sur les différents aspects de cet indice, pour une parfaite égalité, si elle veut sortir du rang des pays à faible IIG. Il convient toutefois de préciser que les inégalités pourraient se réduire lors des prochaines évaluations, eu égards aux récentes performances de la Côte d’ivoire dans le secteur de la santé et de l’éducation.

Le PNUD, comme partenaire de choix  pour la réduction des inégalités  de genre

S’il est vrai que cette tendance révèle l’existence d’inégalité, il faut noter qu’elle est en baisse, par rapport à l’année dernière. Ce qui nous permet de voir plus ou moins les fruits des différents programmes d’autonomisation et de formation mise en œuvre par les autorités nationales avec l’appui technique de leurs partenaires qui devront être poursuivis.  En effet le PNUD dans le cadre de la mise en œuvre de sa stratégie genre 2021-2025, qui vise d’une part  à institutionnaliser la prise en compte systématique de l’approche genre dans la gestion programmatique du bureau et d’autres part, à appuyer les autorités par l’initiation /mise en œuvre de programmes et ou initiatives prenant en compte la réduction des inégalités de sexe et à l’autonomisation des femmes, a mis en œuvre plusieurs initiatives et programmes  prenant en compte la dimension genre. Les résultats obtenus grâce aux interventions du PNUD, ont valu au bureau de Côte d’Ivoire d’être certifié Or à deux reprises en 2017 et 2023 dans le cadre du Gender Equality Seal. Ce programme de certification récompense les bonnes performances du bureau en matière de promotion de l’égalité des sexes et d’autonomisation de la femme. 
Perspectives pour le renforcement des actions en faveur de la promotion des égalités Hommes et Femmes.

  1.  Mobilisations féministes et normes sociales

    Les mobilisations féministes vont de pair avec l’amélioration des droits légaux de participation à la vie économique, de la représentation dans la vie politique, des aides pour le travail familial rémunéré et non rémunéré, de la protection contre le harcèlement sexuel, de l’accès à la propriété foncière, de l’inclusion financière, avec une victoire contre les préjugés. Elles défient les stéréotypes, redéfinissent les frontières et élargissent la capacité d’agir des femmes et des filles. Elles peuvent conduire à l’amélioration du bien-être et de la capacité d’agir des femmes dans toutes les sphères, en utilisant leurs moyens d’expression pour apporter de nouvelles perspectives, participer à égalité à la société et tenir les détenteurs de pouvoir redevables de leurs actes et de leurs décisions. Dans les pays où il y a moins de mouvements féministes, les préjugés à l’égard de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes sont plus nombreuses.
    L'indice des normes sociales liées au genre (Gender Social Norms Index) introduit dans le Rapport sur le développement humain 2019, comprend quatre dimensions : l'intégrité politique, éducative, économique et physique, et mesure les biais, les préjugés et les croyances.

  2. La Promotion des Nouvelles technologies de l’Information et de la Communication

    Exploiter les technologies en vue d’une « grande convergence » dans le domaine du développement humain : La journée de la femme édition 2023 avait pour thème, «  Pour un monde digital inclusif : innovation et echnologies pour l’égalité des sexes », montre le numérique comme l’accélérateur de la réduction des inégalités hommes et femmes. 



    La responsabilité première d’éliminer toutes les discriminations à l’égard des femmes et des filles, et de promouvoir l’égalité entre homme et femme incombe au gouvernement et aux élus/élues. Ils sont appuyées dans la mise en œuvre progressive de ces responsabilités par plusieurs partenaires, y inclus la société civile, le secteur privé, les médias, les partenaires techniques et financiers. Pour ce faire, il faut d’abord bien comprendre et cerner les contours de ce sujet qui suscite encore beaucoup de débats et requiert beaucoup d’efforts. La sensibilisation et la dissémination des concepts clés demeurent donc de mise. La lutte continue...