Renforcer la paix durable à travers l’amélioration du bien-être psychosocial

15 juin 2023
PNUD - Renforcer la paix durable à travers l’amélioration du bien-être psychosocial

Des femmes dans une rencontre de leur groupe de solidarité

©UNDP Burundi 2023

Par Aaron NSAVYIMANA

Les différents conflits qu’a connus le Burundi ont laissé de nombreux cicatrices morales et corporelles. Des stigmates qui demandent des efforts particuliers pour être enlevés. Les membres du corps de police et les femmes sont parmi les franges de la population burundaise qui ont vécu les traumatismes nés de ces conflits et qui méritent d’être traités pour le bien-être de la société. 

Pour répondre à ce besoin social, le PNUD et le gouvernement du Burundi, à travers le ministère de l’Intérieur, du Développement Communautaire et de la Sécurité Publique mettent en œuvre le projet « Renforcement de la paix durable à travers l’amélioration du bien-être psychosocial des femmes affectées par les traumatismes liés aux crises et aux VBGS, et des policiers œuvrant au niveau communautaire ».

Dans le cadre du suivi de ce projet, le gouvernement du Burundi et le PNUD viennent d’organiser, à Makamba, un atelier en vue de faire un état des lieux de la santé mentale et du bien-être psychosociale des policiers, d’évaluer les changements déjà observés grâce au projet et les défis rencontrés.

Aujourd’hui, le projet a identifié 2500 bénéficiaires femmes qu’il accompagne par leur prise en charge psychosocial. 50% d’entre elles ont déjà retrouvé leur bien-être. Une étude de base sexo-spécifique sur les interrelations entre les conflits, violences et la santé mentale couplée au renforcement des capacités de 33 facilitateurs communautaires et 200 leaders des groupes de solidarité, ainsi que la formation de 344 pairs éducateurs (300 civiles et 44 policiers) et l’accompagnement du travail des pairs-éducateurs dans la communauté font partie d’autres réalisations du projet. 

A cela s’ajoutent la sensibilisation et formation des cadres et intervenants locaux, police et autres structures, l’initiation des dialogues communautaires sur les questions de santé mentale, de VBGs et de cohésion sociale. L’appui à l’institutionnalisation de la question de santé mentale au sein de la police, l’opérationnalisation du système de parrainage collinaire pour le renforcement de la paix au niveau communautaire, l’institutionnalisation de l’approche de santé mentale, la formation de 100 Self-Help Groups, dont 55 qui ont déjà reçu l’appui financier, le renforcement des capacités entrepreneuriales des facilitateurs et gestionnaires des Self-Help Groups viennent compléter la liste des réalisations du projet. 

Ce projet a beaucoup contribué à la reconnaissance de la santé mentale comme l’une des priorités essentielles dans les efforts de consolidation de la paix au Burundi. En effet, grâce à ses actions, il s’observe une prise de conscience accrue au sein des autorités et de la population sur le fait que les problèmes de santé mentale non-traités constituent un frein aux actions de capitalisation de la paix et à l’épanouissement individuel pour répondre aux besoins de base. 

Au niveau structurel, il s’observe un grand changement et un engagement des autorités locales à s’approprier l’approche santé mentale et bien être psychosocial dans la gestion et résolution des conflits ce qui a contribué à l’amélioration de la gouvernance locale, témoignent les chefs collinaires et officiers de police. Grâce au projet, des commissaires de police aux comportements agressifs et insupportables qui semaient la terreur au service comme à la maison confessent avoir changés et devenus abordables et doux et prêchent par exemple auprès de leurs pairs. Ceux qui avaient embrassé le métier de policier pour venger leurs ont complètement changé de même ceux qui sombraient dans l’alcool suite aux nombreux traumatismes vécus. Les leaders communautaires reconnaissent aussi avoir subi une transformation, ayant reçu des formations sur la communication non violente, la maitrise de soi et la compréhension des tempéraments des autres. 

Compte tenu de son importance, l’approche sur la santé mentale et bien être psychosocial est institutionnalisée au niveau de l’inspection générale de la police par suite de la compréhension « qu’un  policier doit être mentalement équilibré avant d’accomplir sa mission ». Pour son effectivité, à chaque   causerie morale, les pairs éducateurs ont au moins 15 à 30 minutes pour parler de la santé mentale. Au niveau communautaire, le thème se trouve au centre des dialogues qui ont déjà mis autour de discussions 2.267 femmes et 402 hommes et sert de cadre d’échange sur les sources de conflits, leur résolution pacifique, les formes de violences basées sur le genre, l’égalité des genres, et d’autres questions qui handicapent la paix communautaire afin de trouver des solutions y relatives. Socialement, il sert de ce fait de bon mécanisme pour la résolution des conflits et le changement des mentalités.

Les administratifs locaux disent soulagés depuis l’arrivée de ce projet de résilience mentale et promotion du bien-être social, les plaintes des femmes concernant les conflits conjugaux au niveau collinaire ayant diminuées d’environ 50%. Les administratifs collinaires rapportent aussi un  changement de mentalité chez les hommes qui acceptent facilement de partager le pouvoir de décision et de gestion des ressources familiales avec leurs femmes. « En effet, il leur a été démontré que  l’autonomisation surtout financière de la femme contribue au développement de la famille et se révèle aussi être un remède aux conflits conjugaux souvent exacerbés par la pauvreté au sein des ménages »,  a fait savoir Mariam Nduwimana, cheffe de colline à Makamba. 

Dans la capitalisation de la paix, le projet crée des groupes de solidarité permettant aux bénéficiaires de se regrouper au sein des Self Help Groups pour faire face à la précarité économique qui aggravait leurs états traumatiques.  Ces groupes ont largement contribué à l’amélioration des revenus des ménages grâce au système d’épargne et crédit mutuels qui leur a facilité l’accès à de petits capitaux pour initier des activités génératrices de revenus individuelles et collectives. « Il est aussi à noter que ce projet contribue à la promotion du leadership féminin » témoigne Mme Lyduine  qui a renforcé une résilience psychosociale et une stabilité qui lui a redonnée une bonne réputation jusqu’à être élue cheffe de quartier en commune Makamba.