PNUD - Quand un certificat foncier procure du bonheur à la communauté et aux familles !

16 janvier 2025
Quand un certificat foncier procure du bonheur à la communauté et aux familles !

Kayanza, des agents du bureau foncier local procède à la prise de mesures d'une parcelle pour attribution d'un certificat foncier

©UNDP Burundi/Gakuba Landry, 2023

Par Aaron NSAYIMANA

Au Burundi, dans le monde rural, l’accès au crédit a été depuis longtemps handicapé par le manque de garantie, les seules richesses détenues par la majorité des communautés paysannes se limitant à leurs propriétés foncières et quelques têtes de bétail.

Non enregistrées et souvent sous régime d’indivision pour la plupart des familles, les terres ne pouvaient jusque récemment être hypothéquées auprès des institutions financières, banques et microfinances. Presque exclusive richesse en milieu rural, la terre est aussi très convoitée se transformant souvent en véritable source de conflits qui alourdit non seulement l’administration judiciaire mais aussi met à mal la paix sociale et le développement.

Conscient de cette problématique, le PNUD a pris l’option d’aide le pays à sortir de l’ornière en créant des bureaux fonciers communaux qui facilitent la délivrance de certificats fonciers selon deux approches. A travers la première approche d’Opération Individuelle de reconnaissance (OIR), l'administration communale sensibilise la population à venir faire enregistrer leurs propriétés foncières à la commune moyennant paiement d’une somme dérisoire pour les services de mesurage et de délivrance du certificat. La seconde approche dite Opérations Groupées de Reconnaissance (OGR) où la certification foncière est faite systématiquement sur la totalité d’une colline, sans sauter aucune parcelle à l’exception de parcelles en conflit faisant objet de procès dans les tribunaux. Avec cette approche, menée en collaboration avec le secrétariat permanent de la commission foncière nationale, les certificats fonciers sont produits et délivrés gratuitement aux bénéficiaires.

Nyanza Lac est l’une des communes du pays où la population manifeste beaucoup d’engouement pour l’enregistrement de propriétés foncières devenues désormais une source principale pour accéder au crédit en donnant en garantie les titres ainsi acquis. Aujourd’hui, le nombre de certificats demandés s’élève à 7407 dont 1330 pour OIR et 6077 pour les OGR.

Selon Jean Claude Hakizimana, responsable adjoint du service foncier communal à Nyanza-Lac, il y a un engouement remarquable à acquérir le certificat foncier, devenu aujourd’hui un grand tremplin pour le développement familial à cause de la facilité qu’il offre d’être éligible au crédit auprès des banques et autres institutions de microfinances.

Avec l’hypothèque d’une parcelle de 5 ares sise dans la ville Nyaza-Lac, qui lui a ouvert un crédit de 10 millions de francs bu, Eraste Hakizimana, 32 ans voit sa vie prendre une bonne tournure. En effet, il a directement acheté une moto de transport qui lui a permis de gagner assez d’argent pour acheter une parcelle de 3 millions à Mabanda, une autre ville sise à quelques kilomètres de Nyanza-Lac. Après avoir remboursé le crédit mensuel de 275.000 FBu et assuré quelques dépenses personnelles, Eraste épargne chaque mois 325.000 FBu qui lui permettront de construire la nouvelle parcelle acquise d’une superficie de 5 ares.

Quant à Bernard Nyabenda, membre d’une coopérative de production d’huile de palme à Nyanza-Lac, témoigne que son certificat foncier fait actuellement le bonheur de sa communauté et de sa famille car l’ayant doublement mis en garantie pour permettre à sa coopérative et à lui-même d’obtenir des crédits auprès d’une microfinance. 

Alors que sa coopérative naissante avait besoin d’une mise de 6 millions de francs bu pour avoir un financement de la coopération coréenne, Bernard a donné son certificat en garantie pour avoir cette somme au grand bonheur des 19 membres qui forment SEAMAUL-UNDONG, nom donné à la coopérative en référence  au mouvement national de développement communautaire, qui a révolutionné l’économie de la Corée au début des années 70.

Quelques mois plus tard, Bernard s’est retrouvé face à un besoin d’améliorer sa maison, le même certificat a été considéré par la microfinance qui lui facilement accordé 9.200.000 fbu requis pour les travaux d’extension de sa maison.

Aujourd’hui, considérant que le certificat a procuré le bonheur pour sa communauté et sa famille, Bernard plaide pour une sensibilisation de la part de l’administration pour que la culture du crédit soit ancrée dans les mœurs de la population de Nyanza-Lac parce qu’il y a encore des personnes qui préfèrent vendre leurs propriétés quand ils ont besoin de l’argent ignorant que ces dernières constituent un capital intarissable quand on les met en garantie. Il insiste, « il faut sensibiliser pour ne pas vendre les propriétés foncières et devenir pauvres pendant que les voisins qui ont contracté des crédits s’enrichissent davantage. L’administration doit éveiller la conscience de la population pour acquérir des certificats et les donner en garantie surtout afin de contribuer au développement de la famille et de la communauté ». De son côté, Jean Claude du service foncier communal, témoigne avoir constaté un développement économique induit par la délivrance de certificats fonciers. « Non loin de mes bureaux, j’ai vu des gens construire des maisons mis en location, d’autres ont développé d’autres activités économiques, le certificat est devenu une sorte de véritable mine d’or pour les habitants de notre commune ». 

Bernard, en sa qualité de secrétaire de la coopérative se réjouit de voir cette dernière occuper une place importante dans la région. Ayant opté d’inscrire l’activité dans la dynamique de la gestion de l’environnement, protection de la biodiversité et gestion des déchets. Son capital est actuellement évalué à 60 millions de francs alors qu’au début elle compte presque la moitié, cela est dû à l’engouement que les planteurs de palmiers à huile ont vis-à-vis de la coopérative pour la production de l’huile de palme de haute qualité.

En effet, en plus qu’il utilise de l’eau propre venant du robinet, ce qui n’est pas le cas pour d’autres huileries qui utilisent l’eau des rivières et d’autres sources d’eau, la coopérative dispose d’un hangar servant de stockage et d’abris pour les planteurs qui recourent à ses services d’extraction d’huile. Elle utilise aussi l’énergie solaire pour la cuisson alors que les autres utilisent le bois, menaçant de facto l’environnement, tandis que les déchets produits par la coopérative sont transformés en fumier organique. La coopérative a aussi installé un moulin, ce qui lui permet d’augmenter ses revenus. Aujourd’hui, la coopérative a bâti un nom dans la contrée et est considérée comme une actrice active dans la protection de l’environnement et la promotion de l’économie locale. Cela lui a valu 30 millions de francs sur un financement de 156 millions de francs bu accordé à un consortium de 5 associations impliquées dans la protection de l’environnement à Nyanza-Lac.