Transformer les systèmes alimentaires de A à Z

4 octobre 2021

Les pratiques respectueuses de la nature permettent aux producteurs d'accroître l'offre alimentaire tout en générant des bénéfices à long terme pour les personnes et la planète.

PNUD Tadjikistan

Nous savons depuis longtemps que nos systèmes alimentaires sont défaillants, puisqu’ils menacent à la fois la santé des personnes et celle de la planète. Non seulement les pratiques agricoles non durables dégradent les sols depuis des décennies, mais l'expansion de l'agriculture est également le principal facteur de la perte de 80 % des habitats naturels dans le monde selon la FAO.

Les systèmes agricoles et alimentaires actuels sont également à l'origine des inégalités et de la faim dans le monde. Alors que la production alimentaire mondiale est suffisante pour nourrir la planète, 10 % de la population mondiale souffre de la faim en raison de l'inégalité de la distribution et de l'accès à la nourriture. La situation n'est pas prête de s'améliorer : la demande alimentaire mondiale devrait augmenter de 50 % d'ici à 2050, avec un impact négatif sur la dégradation des terres et des sols.  

La production alimentaire est également responsable d'un quart des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Le GIEC a averti que le changement climatique affecte déjà la sécurité alimentaire et que tout réchauffement supérieur à 1,5°C par rapport aux moyennes préindustrielles aura des répercussions de plus en plus graves sur les systèmes alimentaires.

La bonne nouvelle, c'est qu'avec plus de la moitié des terres habitables de la Terre actuellement utilisées pour la production agricole, nous avons la possibilité de transformer ce défi en notre plus grande opportunité de résoudre nos crises planétaires.

Le retour à des pratiques de production respectueuses de la nature permettra aux producteurs d'accroître l'offre alimentaire tout en générant des bénéfices à long terme pour eux-mêmes et pour la planète. Les solutions sont à notre portée, mais il nous faut changer de paradigme, en nous appuyant sur cinq transformations clés.

1.     Diversifier les espèces végétales de culture pour renforcer la résilience

Nous avons considérablement réduit les variétés génétiques et des cultures qui sont à la base de nos systèmes alimentaires : sur les 6 000 espèces végétales que l'être humain a consommées au fil du temps, nous n'en consommons actuellement plus que neuf, dont trois seulement fournissent 50 % de toutes les calories – le riz, le blé et le maïs. Le danger de dépendre d'une mince sélection de cultures uniformes est qu'elles deviennent vulnérables aux maladies, aux parasites et aux extrêmes climatiques. Il est urgent de repeupler nos paysages agricoles avec des espèces végétales diverses et locales pour favoriser la biodiversité agricole, des sols plus sains, une meilleure alimentation et la résilience climatique.

2.     Modifier les pratiques agricoles pour bénéficier d’avantages multiples

L'agroécologie, l'agriculture régénératrice, l'agroforesterie et l'agrobiodiversité offrent les solutions dont nous avons besoin pour replacer la nature au centre de nos systèmes alimentaires. Ces pratiques ne sont pas nouvelles. En fait, ce sont celles des peuples autochtones et des communautés locales depuis des millénaires. L'objectif final de la mise en œuvre de pratiques agroécologiques est de parvenir à une agriculture régénératrice fondée sur les résultats – pour aider les personnes et la nature à prospérer.

3.     Reconnaître, maintenir et développer les systèmes alimentaires traditionnels et autochtones.

Les systèmes alimentaires régénérateurs et résilients sont des piliers essentiels des moyens de subsistance, des traditions et de l'identité des peuples autochtones. En reconnaissant et en habilitant les petits exploitants, les communautés rurales et les peuples autochtones, nous pouvons jeter les bases d'une transition durable vers une agriculture régénératrice.

4.     Investir dans les communautés pour des chaînes d'approvisionnement durables

Les investissements doivent être conçus pour placer les communautés au centre des chaînes d'approvisionnement des entreprises. Les entreprises ont la responsabilité d'avoir un impact positif sur les communautés avec lesquelles elles font des affaires. Les entreprises peuvent apporter des changements significatifs en établissant des partenariats solides avec les agriculteurs communautaires et en garantissant un commerce équitable et le partage des bénéfices avec les producteurs locaux.

5.     Éliminer la déforestation et la conversion des forêts des chaînes d'approvisionnement

Il est essentiel de préserver ce qui reste de forêts et d'habitats naturels intacts pour éviter que nous n'atteignions des points de basculement en matière de changement climatique et de perte de biodiversité. Nous devons éliminer la déforestation et la conversion des chaînes d'approvisionnement, en ciblant tout particulièrement les principaux facteurs : le bœuf, le soja et l’huile de palme. La technologie géospatiale, de plus en plus puissante et abordable, promet de permettre un meilleur suivi de la déforestation et de la conversion le long des chaînes d'approvisionnement. Les investisseurs, les acheteurs, les négociants et les gouvernements ont également un rôle essentiel à jouer dans la réorientation des investissements et du commerce, la réaffectation des subventions agricoles et la création d'environnements favorables à la mise en place de chaînes d'approvisionnement durables.

Tout cela ne peut se produire que si nous adoptons une approche systémique pour transformer durablement les systèmes alimentaires. Nous devons embrasser la complexité et l'incertitude, et utiliser des approches systémiques pour mieux identifier les meilleurs leviers de changement spécifiques à chaque contexte, et pour mettre à l’échelle la transformation des systèmes alimentaires. Il est essentiel de relier la production, la finance et la demande dans tous les secteurs pour apporter un changement durable. Une approche collaborative authentique et inclusive est fondamentale afin d’instaurer confiance et compréhension entre les parties prenantes, afin de créer une vision commune et d’agir sur ces voies de transformation.

Nous avons de nombreuses raisons d'espérer que cette transformation se produira. Voici quelques-unes des raisons récentes :

  • Les remarquables initiatives communautaires lauréates du Prix Équateur (en anglais) célébrées hier – qu'il s'agisse de CoopCerrado au Brésil, de MOORIBEN au Niger, de BIO-KG au Kirghizstan ou d'Aadhimalai en Inde – font progresser les solutions sur le terrain afin de transformer les systèmes alimentaires pour la nature et les personnes.
  • La plus grande entreprise alimentaire du monde, Nestlé SA, s'est engagée à investir environ 1,3 milliard de dollars sur cinq ans pour aider les agriculteurs et les fournisseurs à passer à des pratiques d'agriculture régénératrice. Des annonces similaires ont été faites par d'autres grandes entreprises alimentaires comme PepsiCo, General Mills et Unilever, qui se sont engagées à adopter des pratiques d'agriculture durable et régénératrice.
  • Le Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires (en anglais), qui s'est tenu pendant l'Assemblée générale des Nations Unies à New York le 23 septembre, a permis à plus de 90 chefs d'État et de gouvernement de s'engager à transformer les systèmes alimentaires mondiaux afin d'atteindre les ODD d'ici 2030.

Pour s'inspirer des solutions mises en œuvre par les gouvernements, les entreprises, les philanthropies, la société civile, la science et les IPLC pour mettre la nature et les communautés au centre de nos systèmes alimentaires, nous vous invitons à nous rejoindre demain pour la deuxième journée du Nature for Life Hub.