Le numérique, une opportunité pour les migrants

20 janvier 2021

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De la santé à l'éducation, de l'économie à la protection sociale, la crise de la COVID-19 a affecté notre vie sous tous ses aspects. Deux phénomènes mondiaux en particulier ont connu des changements considérables, à savoir, la mobilité humaine et la façon dont la technologie numérique façonne le monde du travail.

Depuis le début de l'année 2020, la mobilité humaine sous toutes ses formes a été profondément bouleversée, en particulier les migrations internationales. Des personnes se sont retrouvées bloquées aux frontières, certaines n’ont pas pu quitter leur pays d'origine, d'autres encore n’ont pas été en mesure de rentrer chez elles après avoir séjourné à l'étranger. Sur la seule année 2020, les restrictions de déplacement ont ralenti la hausse des migrations dans le monde de 27 %, ce qui représente deux millions de personnes.

Des études montrent que les migrants courent souvent un plus grand risque de tomber malades, avec des taux d'infection par la COVID-19 deux fois plus élevés pour eux dans certains pays de l'OCDE. L'équivalent de 400 millions d'emplois ont été perdus au cours du deuxième trimestre de 2020, ce qui a affecté les migrants de manière disproportionnée.

Les migrants ont continué d’envoyer de l'argent dans leurs pays d'origine, puisant souvent dans leurs économies car beaucoup d'entre eux ont perdu leurs moyens de subsistance. Malgré une baisse des envois de fonds et son corollaire de souffrance, ceux-ci n'ont pas diminué autant que ce que l'on craignait au départ. Les migrants ont utilisé des outils bancaires en ligne, ce qui souligne l'importance de la technologie numérique pour maintenir l'économie debout.

La pandémie a singulièrement entraîné l'adoption rapide des outils numériques. L'intelligence artificielle, la crypto-monnaie, la réalité virtuelle, l'Internet des objets et de nombreuses nouvelles technologies participaient déjà à transformer le monde du travail. La nécessaire distanciation sociale et la limitation des déplacements ont fait progresser cette transformation numérique de manière exponentielle.

Pour les migrants et les personnes déplacées, comme pour tous ceux qui aspirent à une vie meilleure, la technologie numérique offre des avantages et des possibilités uniques pour améliorer les moyens de subsistance. En ligne, on peut acquérir des compétences, accéder à des informations et à des services essentiels et créer des réseaux. On peut par ailleurs trouver un meilleur emploi, créer des entreprises ou explorer de nouveaux marchés.

L'innovation numérique au service des migrants

Les catastrophes naturelles ont causé le déplacement de près de 700 000 Bangladais chaque année au cours de la dernière décennie. Environ 400 000 personnes arrivent à Dhaka chaque année, tandis que d'autres partent à la recherche d’opportunités à l'étranger, si bien qu’un dixième de la main-d'œuvre du Bangladesh est employée dans d'autres pays.

Afin de soutenir les Bangladais qui se sont déplacés à l'intérieur du pays ou qui ont migré à l'étranger, le PNUD a aidé à mettre en place et à doter en personnel le programme gouvernemental Aspire to Innovate (A2i), qui utilise la technologie numérique pour fournir des services de santé, d'éducation et des moyens de subsistance.

A2i a développé un portail en ligne pour les travailleurs migrants, les personnes déplacées de force et les communautés d'accueil afin d'améliorer leur employabilité en leur proposant des formations en ligne destinées à renforcer leurs compétences et des offres d'emploi.

La plateforme aide également les travailleurs migrants à l'étranger. Il existe six centres numériques pour expatriés, dont trois en Arabie saoudite, où un tiers de tous les migrants bangladais vont chercher du travail.

Un autre projet A2i fournit aux Rohingyas vivant dans des camps au Bangladesh et aux communautés d'accueil locales les outils en ligne nécessaires pour développer des lignes de vêtements et les mettre en relation avec le marché international.

Sharifa, une Rohingya vivant dans un camp au Bangladesh, a pu distribuer ses produits artisanaux grâce à un grand réseau de commerce électronique à l’issue d’une formation commerciale, ce qui lui a permis de gagner un revenu substantiel.

Le succès d'A2i au Bangladesh a incité le PNUD à étendre ce modèle à l'échelle internationale en partageant l'apprentissage, les modèles et les méthodologies avec d'autres pays. La plateforme a déjà été adaptée pour les réfugiés syriens en Turquie, et le PNUD cherche à voir comment elle peut être utilisée pour les Syriens en Jordanie et les Vénézuéliens en Colombie.

En Turquie, Faisal, réfugié syrien et développeur web qualifié, participe au programme A2i en tant que conseiller commercial au service d'autres Syriens. Il les oriente sur des questions de création d’entreprise, de demande d’agrément et de notoriété en tant que travailleur indépendant, sur la plateforme.

L'avenir de la mobilité humaine

Chaque année, le Forum mondial sur la migration et le développement (FMMD) rassemble des gouvernements pour orienter le débat sur la migration et son potentiel de développement. Cette année, le sommet du FMMD (du 18 au 26 janvier) se penche sur l'avenir de la mobilité humaine, et les nouvelles technologies figurent en bonne place à l'ordre du jour.

La pandémie a mis en évidence l'importance des outils numériques pour assurer aux migrants de pourvoir à leur subsistance. Un rapport du PNUD de 2019, intitulé Migrant Union : Digital Livelihoods for People on the Move (disponible en anglais), identifie les écarts entre, d’une part, les outils et services numériques disponibles, ainsi que les politiques qui les régissent et, d’autre part, les besoins et les comportements des migrants. Les partenariats sont essentiels pour créer des opportunités. Le secteur privé, qui détient ces outils numériques et ces marchés, ainsi que les employeurs de migrants, jouent un rôle essentiel en termes d'inclusion.

Le PNUD est prêt à aider les gouvernements et la sphère technologique à établir des partenariats pour créer des opportunités afin que les migrants ne soient pas laissés pour compte dans la révolution numérique. Nous demandons instamment que les décideurs politiques présents au FMMD établissent un programme ambitieux qui garantisse que les migrants, quelles que soient leurs qualifications, de contribuer davantage au développement en utilisant la technologie.