Dépasser les stéréotypes, vers l'égalité : transformation numérique et genre

14 mars 2022

PNUD Mauritanie

La pandémie de COVID-19 a accéléré à l'échelle mondiale une transformation numérique axée sur les données, avec davantage de personnes en ligne pour le travail, les loisirs et l'apprentissage. Passer plus de temps en ligne signifie augmenter les opportunités de connexions virtuelles, mais pose également des problèmes nouveaux et uniques.

Les technologies numériques sont un puissant moteur de l'égalité des sexes, permettant aux femmes et aux filles d'accéder à de nouvelles informations, opportunités et ressources. Cependant, la fracture numérique entre les sexes persiste, en partie à cause des normes sociales et de genre et des stéréotypes sexospécifiques profondément enracinés. Il en découle que de nombreuses femmes — en particulier celles des pays en développement — doivent continuellement faire face à des difficultés pour accéder aux technologies numériques et les utiliser. Le rythme auquel les filles et les jeunes femmes apprennent à coder, par exemple, reste inférieur à celui des garçons et des hommes. Et à l'échelle mondiale, les femmes ne représentent que 29 pour cent de la main-d'œuvre STEM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques) et ont moins de chances que les hommes d'avoir accès à une éducation dans les domaines liés aux sciences et à la technologie.

Même lorsqu'elles ont accès à Internet, les femmes et les filles sont souvent confrontées à la violence et au harcèlement en ligne sous forme de messages explicites ou pornographiques et de cyberharcèlement. Dans l'Union européenne, 1 femme sur 10 a subi une forme ou une autre de harcèlement en ligne dès l'âge de 15 ans. Au Pakistan, on estime que 40 % des femmes ont été confrontées à diverses sortes de harcèlements sur Internet. La pandémie a aggravé la situation. Dans neuf pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, une enquête d'ONU Femmes a révélé que le harcèlement en ligne était le type de violence à l'égard des femmes le plus fréquemment signalé pendant la pandémie.

Le harcèlement en ligne peut également avoir des conséquences hors ligne. En Amérique latine et en particulier au Guatemala et au Mexique par exemple, les possibilités de harcèlement et de violation de la vie privée ont été citées comme faisant partie des principaux obstacles à l'accès des femmes aux services numériques. La pression peut avoir des effets dévastateurs sur la santé mentale des femmes, la violence en ligne étant liée à la dépression et même à l'automutilation.

Nous avons besoin d'un Internet sûr, abordable et inclusif, qui n'alimente pas les stéréotypes sexuels préjudiciables, ne fasse pas taire la voix des femmes et ne mette pas en péril la sécurité et les droits des femmes. De même, nous avons besoin d'outils numériques pour stimuler la participation et l’autorité des femmes dans l'espace numérique. Il ne suffit pas que les femmes et les filles aient simplement accès à la technologie et aux compétences numériques ; elles doivent également devenir des agents actifs du changement afin de créer un avenir numérique plus sûr et équitable pour tous.

Cette responsabilité nous incombe à tous — gouvernements, organisations de la société civile, secteur privé, sans oublier les entreprises technologiques, et les forces de l'ordre. Sans une gouvernance fondée sur les droits et des garde-fous éthiques, nous courrons le risque encore plus grand de négliger les femmes et les filles dans la transformation numérique en cours.

Les actions pour lutter contre la cyberviolence et pour concevoir activement des espaces en ligne sûrs sont insuffisantes. Un petit nombre de pays ont promulgué une législation contre la violence sexiste en ligne, mais avec la technologie qui progresse rapidement, de nombreux pays sont à la traîne. Il est nécessaire de créer des réglementations et des lois plus strictes, et d’investir dans les forces de l'ordre et les agents de justice spécialisés dans la lutte contre la violence en ligne avec une approche des droits de l'homme et du genre. Nous devons également continuer à collaborer pour lutter contre les normes sociales et les stéréotypes discriminatoires et préjudiciables. Les entreprises technologiques doivent s'engager davantage dans la lutte contre la violence sexiste tout en garantissant la sécurité de leurs plateformes pour tous. L'année dernière, Facebook, Google, Twitter et TikTok ont ​​fait un pas dans la bonne direction, en s'engageant à corriger les faiblesses persistantes dans la manière dont elles affrontent la violence sexiste en ligne, notamment en utilisant des systèmes améliorés et plus fiables pour signaler les abus en ligne.

Au PNUD, nous travaillons avec des partenaires mondiaux pour lutter contre la pandémie fantôme de violence à l'égard des femmes, notamment la violence en ligne. Le PNUD aide près de 100 pays à mettre fin à la violence sexiste, notamment dans le cadre de Spotlight Initiative. Avec la nouvelle stratégie numérique du PNUD, nous nous engageons également à promouvoir des approches inclusives et sensibles au genre pour renforcer l'égalité des sexes et relever les défis persistants et émergents qui affectent les femmes en ligne, notamment les problèmes de sécurité et la fracture numérique entre les sexes. Dans le cadre de nos efforts, le genre sera intégré dans les activités numériques du PNUD. La transformation numérique qui sera lancée cet été deviendra également l'un des éléments essentiels de la prochaine Stratégie du PNUD pour la promotion de l’égalité des sexes.

La nouvelle stratégie numérique s'appuie sur le travail existant du PNUD visant à garantir que nos initiatives de transformation numérique favorisent l’inclusion des femmes, notamment en créant des outils adaptés localement qui aideront les femmes à reconnaître, signaler et se remettre des abus en ligne. Au Kirghizistan, par exemple, le PNUD a aidé à mettre au point Mildet, un chatbot (dialogueur) qui donne aux femmes la possibilité d'identifier les signes d'abus psychologiques et financiers en ligne. Au Kosovo, avec le soutien de la Norvège, le PNUD a lancé une campagne intitulée « ‘Careful on the Internet!’, / Attention sur Internet ! », qui rassemble des professionnels de la cybersécurité, des membres de la société civile et des citoyens concernés pour sensibiliser le public à la sécurité sur Internet. Pour encourager les gouvernements à lutter contre la pandémie en adoptant un prisme sexospécifique, le PNUD et ONU Femmes ont créé l’outil mondial de suivi des mesures sexospécifiques de lutte contre la COVID-19 (COVID-19 Global Gender Response Tracker), qui surveille les réponses politiques mondiales à la pandémie.

Alors que nous célébrons le deuxième anniversaire de la pandémie de COVID-19, il est crucial que nous veillions à ce que les technologies numériques soient utilisées pour accélérer les progrès vers les objectifs de développement durable et l'égalité des sexes, et non pour nous faire reculer davantage. Nous devons travailler ensemble pour lutter contre la cyberviolence et mettre au point des outils numériques pour prévenir et répondre à la violence basée sur le genre. Nous devons éliminer la fracture numérique entre les sexes qui freine les femmes et les filles. Nous n'avons pas de temps à perdre.