En Somalie, faire en sorte que sécheresse ne rime plus jamais avec famine

La réponse humanitaire d'urgence est vitale, mais seuls des gains de développement à long terme sortiront le pays de la pauvreté, de la vulnérabilité et de l'insécurité.

29 janvier 2018

2017 a été une année déterminante pour la Somalie, avec l’élection d'un nouveau président et d'un Parlement suite à un processus électoral historique, suivi du lancement d'un plan national de développement (2017-19). Cependant, cette transition pacifique a été bientôt ternie par une déclaration de « catastrophe naturelle » sous la forme d’une sécheresse prolongée entraînant la crainte d’une famine. À la fin de 2017, 6,2 millions de personnes avaient besoin d’une aide humanitaire et plus d’1 million de personnes étaient déplacées à l'intérieur du pays.

Si les efforts conjoints du gouvernement somalien et des partenaires locaux et internationaux ont permis d'éviter une nouvelle famine, les signes (anglais) indiquent que les effets de la sécheresse se poursuivront en 2018.

Ces indicateurs nous rappellent la nécessité de relier l'aide humanitaire à la planification du développement à moyen et à long terme grâce à des systèmes gouvernementaux solides, au secteur privé et à la société civile. Une réponse urgente est vitale, mais seuls des gains de développement à long terme - fournis en parallèle - permettront de sortir le pays de la pauvreté, de la vulnérabilité et de l'insécurité.

La 'nouvelle méthode de travail' (ou NWOW), établie lors du Sommet humanitaire mondial en 2016, nous aide à combler le fossé entre les efforts humanitaires et de développement en :

  1. déterminant des objectifs collectifs de réduction des besoins ;
  2. répartissant les rôles et les responsabilités en fonction des avantages comparatifs des parties prenantes ; et
  3. assurant collectivement le financement et en créant la capacité pour assurer une réponse continue sur une période plus longue.

DINA*, ou l'évaluation de l'impact et des besoins suite à la sécheresse

C'est dans ce contexte que le Gouvernement somalien - avec le soutien des Nations Unies (ONU), de la Banque mondiale et de l'Union européenne (UE) - a réalisé une évaluation de l'impact de la sécheresse de 2017 sur la vie et les moyens de subsistance des Somaliens.

Inédite en Somalie, DINA a identifié des solutions durables pour s'attaquer aux causes profondes des crises récurrentes et les a alignées sur le NWOW, favorisant ainsi une collaboration plus étroite entre la réponse humanitaire et les investissements de développement.

Pour ce faire, 180 experts des différentes parties prenantes ont collecté des données dans 18 secteurs, intégrant les données existantes de l'aperçu des besoins humanitaires de la Somalie (anglais). Les secteurs analysés concernent, entre autres, l'agriculture, l'approvisionnement en eau et l'assainissement, la santé et la nutrition, la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance, l'éducation et la protection sociale.

Avec des dégâts s'élevant à 1,02 milliard de dollars et des pertes estimées à 2,23 milliards de dollars, DINA estime que l'impact total de la sécheresse de 2017 en Somalie devrait dépasser 3,25 milliards de dollars. Les besoins de recouvrement totaux sont estimés à 1,77 milliard de dollars. L'agriculture et les services municipaux urbains sont les secteurs les plus touchés, représentant 28% et 17% des besoins totaux.

Et maintenant ?

Les conclusions de DINA ont contribué à l'élaboration d'un Cadre de Relèvement et de Résilience (RFF, anglais), lui-même un pas important vers une stratégie globale pour l'élaboration de politiques et le financement du relèvement économique et du développement à long terme. Le RFF permet aux institutions somaliennes de s'appuyer sur les efforts existants pour renforcer leur résilience face aux catastrophes récurrentes.

Le gouvernement a ainsi établi un Ministère pour les affaires humanitaires et la gestion des catastrophes, et adopté un cadre législatif pour la gestion des catastrophes au sein des institutions gouvernementales concernées, ce qui améliore la gouvernance des risques au niveau fédéral et régional.

DINA et RFF fournissent également aux acteurs du développement une idée des coûts et d'un plan d'action susceptible de réduire la vulnérabilité de la Somalie, de renforcer les moyens de subsistance et d'accroître la croissance économique. Parmi les exemples de collaboration figurent la campagne d'identification pour le développement (ID4D, anglais) de la Banque Mondiale et un travail analytique sur le fédéralisme (anglais) qui exploite les atouts du travail de la Banque mondiale et du PNUD sur la gouvernance locale (anglais).  

Malgré tout, un Somalien sur deux a toujours besoin d'aide humanitaire. La saison du Gu en 2018 (avril-juin) pourrait potentiellement devenir la 5ème saison consécutive sans pluies, exacerbant la crise.

C'est pourquoi la poursuite de l'aide humanitaire et l'appui aux moyens de subsistance, parallèlement à des solutions de développement axées sur la création d'emplois, l'accès au financement et le soutien à la prestation de services publics, sont essentiels en 2018, pour éviter que sécheresse ne rime à nouveau avec famine.

* (DINA) Drought Impact and Needs Assessment