Le Sénégal encourage l’innovation des jeunes pour des systèmes alimentaires résilients

À Mont-Rolland, au Sénégal, François Diouf dirige vingt jeunes agriculteurs qui mettent en commun 5 hectares pour cultiver des haricots destinés à l’exportation et des légumes pour les marchés locaux, en partageant équitablement tous les revenus.

25 août 2025
A person tending to green plants in a field under a clear blue sky.

PNUD Sénégal

Sénégal

À Kolda, dans cette région verdoyante du sud du Sénégal, l'agriculture fait vivre la plupart des familles. Mais les pluies arrivent de plus en plus tard et tombent de façon imprévisible, laissant chaque graine dépendre entièrement du bon vouloir du ciel.

Pour s'adapter, Mariama, une jeune rizicultrice, mise sur des semences résistantes aux aléas climatiques et utilise des outils numériques pour suivre ses cultures. Elle incarne cette nouvelle génération qui cherche à rendre l'agriculture plus résiliente et durable.

Pourtant, dans cette région où le climat capricieux compromet les récoltes et où l'accès au crédit reste très limité, elle et des milliers d'autres jeunes agriculteurs luttent encore pour faire face aux chocs climatiques et à l'instabilité des marchés.

Alors que 60 % de la main-d'œuvre jeune du Sénégal travaille dans l'agriculture ou les filières connexes, seulement 15 % des jeunes agriculteurs peuvent accéder au crédit bancaire ou de microfinance. De plus, les pertes agricoles liées au climat représentent plus de 30 milliards de francs CFA (environ 50 millions de dollars américains) chaque année.

Face à ce défi, la Compagnie nationale d'assurance agricole (CNAAS) se révèle être un véritable atout pour sécuriser les investissements, encourager l'innovation et permettre aux jeunes agriculteurs de transformer les systèmes alimentaires. Elle a institutionnalisé l'assurance agricole comme pilier de résilience. Le Forum africain des systèmes alimentaires (AFSF) 2025 à Dakar mettra en avant cette expérience sénégalaise.

La CNAAS au service des jeunes

Créée en 2008, la CNAAS est un organisme public-privé qui propose des solutions d'assurance sur mesure pour les petits producteurs :

  • Des produits d'assurance indicielle simples et accessibles couvrant les déficits pluviométriques, les pertes de rendement et les risques pastoraux
  • Des campagnes d'information et de formation destinées aux jeunes membres des coopératives agricoles
  • Une couverture groupée pour les jeunes entrepreneurs-producteurs dans le cadre de l'initiative Agri-Jeunes

En 2024, plus de 2 000 jeunes ont bénéficié d'une couverture d'assurance via la CNAAS, ce qui leur a permis de sécuriser le financement de leurs activités saisonnières. L'impact se ressent dans des groupes comme la coopérative de jeunes femmes d'Aissatou dans le Saloum : « Grâce à l'assurance, notre coopérative a pu investir dans des semences améliorées et obtenir du crédit sans craindre les aléas climatiques. »

Cela démontre comment l'assurance agricole, quand elle s'inscrit dans une stratégie globale de gestion des risques, offre aux jeunes entrepreneurs bien plus qu'une simple protection de leurs cultures : elle leur ouvre l'accès au financement, les encourage à expérimenter des techniques agricoles innovantes et leur permet de développer leurs activités avec plus de confiance.

« L’agriculture est notre avenir. Mais pour avancer avec audace vers cet avenir, nous devons être protégés de ses risques. L’assurance est notre filet de sécurité pour innover. »
M. Dieme, Gestionnaire de base de données d’une coopérative agricole à Ziguinchor, Sénégal

Les jeunes, moteurs de l'innovation au Sénégal

Les jeunes agriculteurs ne se contentent pas d'accéder à l'assurance – ils stimulent la transformation agricole. Les jeunes sont à la pointe de l'innovation en agritech, développant des solutions qui vont des capteurs et systèmes d'alerte précoce aux plateformes de cartographie des parcelles et de données climatiques. La startup sénégalaise Tolbi utilise l'imagerie satellite et l'intelligence artificielle pour fournir des informations ultraprécises sur la météo, l'irrigation et la santé des sols, permettant d'augmenter les rendements de plus de 200 % dans certains cas. 

Dans le domaine de l'assurance agricole spécifiquement, les jeunes entrepreneurs développent des applications mobiles pour faciliter l'inscription et la gestion des polices d’assurance, conçoivent des outils d'éducation financière en langues locales et exploitent l'imagerie satellite pour paramétrer des produits d’assurance indicielle qui déclenchent automatiquement les indemnisations selon les données météorologiques. 

Cette innovation est soutenue par des initiatives du PNUD comme le Projet Plateforme COVID-19 (2020-2022), qui a aidé 50 PME agricoles dans leur formalisation, leur planification d'entreprise et leur éducation financière, révélant des talents comme François Diouf et Anne-Marie Cisse.

« Si on aide la jeunesse au Sénégal ainsi qu'au Sahel, elle pourra se développer et développer les pays. La jeunesse veut réussir ! », affirme François Diouf, président d'une ferme communautaire écologique et sociale à Mont-Rolland.

Comment le PNUD accompagne les gouvernements pour encourager l'innovation en réduisant les risques

Alors que le PNUD soutient l'innovation menée par les jeunes, il travaille aussi avec les gouvernements pour créer les conditions favorables aux marchés d'assurance agricole. L'initiative Résilience financière en agriculture du PNUD accompagne les gouvernements à travers trois piliers fondamentaux :

  1. Renforcer l'environnement institutionnel pour que les gouvernements intègrent l'assurance dans leurs priorités nationales de développement.
  2. Développer les bases techniques du marché en renforçant les capacités locales en matière de données climatiques et de modélisation des risques.
  3. Promouvoir des modèles innovants qui associent l'assurance aux services agricoles et au financement.

Le Sénégal illustre parfaitement cette approche globale en :

  • Adoptant un cadre législatif incitatif, avec des exonérations fiscales sur les contrats d'assurance agricole et une subvention publique de 50 % des primes pour les agriculteurs.
  • Intégrant l'assurance agricole dans ses grandes orientations stratégiques comme le Plan Sénégal émergent et la stratégie nationale de résilience climatique.
  • Nouant des partenariats public-privé avec plus de 20 banques, institutions de microfinance et organisations de producteurs.
  • Favorisant l'innovation numérique et les technologies financières agricoles, offrant ainsi un terrain propice aux solutions portées par les jeunes et les acteurs locaux.

Ces efforts permettent de lever les obstacles structurels qui freinent l'entrepreneuriat des jeunes, en facilitant l'accès au crédit et en associant l'assurance aux semences, aux engrais et à l'accompagnement technique.

L'expérience sénégalaise démontre qu'avec le bon cadre politique et les bons partenariats, l'assurance agricole peut devenir un outil puissant pour renforcer la résilience climatique tout en autonomisant la prochaine génération d'agriculteurs. Comme le résume bien M. Dieme, gestionnaire de base de données d'une coopérative agricole de Ziguinchor, Sénégal : « L’agriculture, c’est notre futur. Mais pour oser l’avenir, il faut être protégé contre ses risques. L’assurance, c’est notre filet de sécurité pour innover. »