De déplacée interne à productrice maraichère autonome, l’exemple de Kadi et de ses amies

7 juin 2021

Guire Kadi, avec ses enfants, arrosant sa parcelle de terre (au début de l’exploitation) - Photo : PNUD/ Aurélia Rusek

Depuis plusieurs années, les attaques terroristes récurrentes dans plusieurs zones du Burkina Faso ont fait plusieurs victimes autant militaires que civiles. La région du Sahel, située à l’extrême Nord du pays et frontalière du Mali et du Niger, est l’une de celles qui ont payé un lourd tribut de cette insécurité. Cette situation entraine un déplacement de populations vers des centres urbains jugés plus sécures. C’est ainsi que Kaya au Centre Nord, accueille actuellement 414 651 Personnes Déplacées Internes (PDI) sur 1 121 960 pour tout le pays.

A l’issue d’une énième attaque meurtrière dans son village, Guiré Kadi, la trentaine bien sonnée, originaire d’Arbinda, a fui avec ses quatre enfants et d’autres membres de sa communauté pour se réfugier à Kaya. Ils ont trouvé hospitalité auprès d’une population accueillante mais en pareille circonstance, les maigres ressources s’évaporent très vite et on tombe dans la précarité. Heureusement, elle a reçu une assistance alimentaire (bien qu’insuffisante) de la part des humanitaires présents sur place.  Le cas de la famille de Kadi n’est pas isolé car actuellement, la ville de Kaya accueille 105 013 PDI, dont plus de 80% sont logés dans des familles d’accueil. Kadi fait partie de ces PDI qui bénéficient de la charité et l’entraide de la population locale de Kaya qui leur offre l’hébergement.

Conscient de l’urgence de la situation, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), installé depuis Juillet 2019 dans la région du Centre Nord dans le cadre du renforcement de la présence intégrée du Système des Nations Unies sur le terrain, en partenariat avec une ONG locale, l’Association pour la Promotion des Initiatives Locales (APIL), a initié un projet d’appui aux Activités Génératrices de Revenus (AGR) de ces populations vulnérables en vue de renforcer leur résilience et assurer leur relèvement rapide face à cette crise. Les appuis se sont portés à la fois aux femmes PDI comme Kadi, mais aussi à l’endroit des femmes de la population hôte qui s’est également trouvée en situation de besoins face à cet élan de générosité et de partage pour leurs compatriotes.

Grâce aux fonds octroyés par ledit projet en décembre 2019, Kadi et une trentaine d’autres femmes, ont choisi parmi les types d’AGR, de se mettre ensemble pour exploiter un lopin de terre d’une superficie de 0,5 hectare pour le maraichage. Cet espace leur a été confié par Ouédraogo Inoussa, un propriétaire terrien, généreux et sensible à la situation des PDI. Kadi et ses amies, grâce à la subvention du PNUD, ont acquis entre autres une motopompe équipée pour faciliter l’irrigation de leur terrain et d’autres outils de travail comme les pelles, les arrosoirs et brouettes ainsi que du grillage pour la clôture.

Quatre mois plus tard, les résultats étaient déjà visibles. La terre aride est devenue un site maraicher où l’on produit de la salade, des aubergines, du maïs, des oignons, du piment, de la tomate, des concombres et de l’oseille qui alimentent de nos jours les marchés de Kaya. Les exploitantes réalisent un chiffre d’affaires de 68 millions FCFA et chaque maraichère a empoché 485.000 FCFA (USD 900) en bénéfice net. Le champ de maraichage est passé de 0,5 à 2,5 hectares, une vingtaine d’autres femmes ont rejoint le groupement et l’activité maraichère fait vivre plus d’une cinquante de ménages. Kadi a commencé à louer une maison décente pour sa famille et la petite fille de Kadi va maintenant à une école tout près de son secteur et est bien intégrée parmi les enfants de sa classe.  

« Depuis l’appui reçu du PNUD, ma vie a changé. Nos premières récoltes nous ont aidé à payer les petits besoins comme le pétrole, le savon, le bois de chauffe et les vêtements des enfants. Maintenant, j’arrive à payer mon loyer et ma fille va à l’école à côté. Nous consommons une partie de nos produits ! Nous continuons à produire suffisamment et envisageons de transformer nos produits », explique Kadi en souriant.  

L’expérience positive tirée du groupe de Kadi et l’accroissement des besoins sur place ont encouragé le PNUD à poursuivre d’autres projets de résilience et de renforcement de la cohésion sociale pour le Centre Nord.

L’histoire de Kadi et de ses amies montre à souhait que quand les femmes veulent se développer, elles sont capables de changer leur vie avec un minimum de soutien et d’assurer elles-mêmes leur autonomie économique. Les femmes peuvent être des ambassadrices de la paix et de la cohésion sociale à travers l’union et la solidarité.

Les efforts déployés sur le terrain par le PNUD et ses partenaires impactent la vie de leurs bénéficiaires. D’une situation affligeante au départ, ces femmes déplacées ont pu développer leurs capacités de résilience et se sont rendues autonomes: Elles représentant maintenant des modèles pour les communautés au Burkina Faso et dans le Sahel.

Guire Kadi avec ses enfants sur sa parcelle de terre cultivée. Photo : PNUD Burkina/Déborah