Le genre dans la stabilisation

Le projet de stabilisation mis en œuvre par le PNUD a tenu compte de diverses vulnérabilités et considère la composante genre comme un outil révélateur de vulnérabilité et un mécanisme pour renforcer l’égalité des sexes dans ses activités.

28 mars 2023

Les membres de la coopérative "Mandemo" en transformation agroalimentaire

@PNUD Mali / Ousmane Arama

Au Mali, les femmes sont particulièrement exposées aux impacts de la pauvreté, du changement climatique et de l’absence de services de base. Outre des niveaux de soins en santé maternelle peu ou pas en adéquation avec les besoins, les femmes ont peu accès à l’éducation et participent encore moins à la vie économique et politique. Cette crise qui sévit dans la zone de Liptako-gourma et précisément dans la région de Bandiagara affecte tous les âges de façon différente.

Malheureusement, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour parvenir à la pleine égalité des droits et des chances entre les hommes et les femmes. Il est primordial de mettre fin aux multiples formes de violences basées sur le genre et d'assurer un accès égal à une éducation et à une santé de qualité, à des ressources économiques et à la participation à la vie politique.

L’analyse des facteurs catalyseurs de la stabilisation tels que la paix et la sécurité, la cohésion sociale, l’accès aux infrastructures de bases et la restauration de l’économie locale de Bandiagara révèle que l’égalité des sexes doit être au centre de l’approche de la stabilisation de la région de Bandiagara pour que le retour de l’autorité de l’état soit effectif et rapide.

L'association "Amaduinge" formé en entrepreneuriat et en gestion d'entreprise

@PNUD Mali / Ousmane Arama

Depuis la première phase du projet dans la région de Bandiagara, plusieurs activités ont été menées en faveur des groupes vulnérables tels que les femmes, les jeunes et les personnes en situation de handicap. Ces derniers ont bénéficié des appuis ayant permis de rehausser l’économie locale à travers les activités de renforcement des moyens (travaux à haute intensité de main d’œuvre, argent contre travail (cash for work)) des formations en entreprenariat, des dotations de kits de travail en vue de prôner le retour de la paix dans la région.

La perception et les préoccupations sécuritaires

Les violences basées sur le genre représentent une menace préoccupante dans le contexte actuel d’insécurité et de prolifération des groupes armés au Liptako-gourma. La présence des groupes armés représente une menace pour les droits des femmes et leur autonomisation. Alors que des analyses montrent que la perception de l’insécurité et les préoccupations sécuritaires varient entre les hommes et les femmes, les approches en matière de politiques sécuritaires ne sont pas différenciées entre les sexes. Dans ce contexte, sur le plan sécuritaire, le projet a renforcé l’éclairage avec plus de 278 lampadaires sur les sites des infrastructures sociales et les axes routiers, permettant de réduire le risque d'être exposés aux violences sexuelles et sexistes auxquelles les femmes et les filles étaient confrontées.

Brahima Saye, père de deux enfants dont une fille et un garçon, habite avec sa famille en face du camp des PDI nouvellement installé parle projet. Il relate qu’ils sont restés sans électricité pendant plus d’une décennie. « Les tombées de la nuit laissaient place à la peur. Au crépuscule, on ne pouvait plus commissionner quelqu’un sauf s’il avait l’intention d’aller en ville. Régulièrement, certaines personnes non identifiables intimidaient nos jeunes filles sur cette route dans l’obscurité. Aujourd’hui, avec les lampadaires, nous pouvons sortir quand nous voulons et avec quiétude. La lumière fonctionne vingt-quatre heures sur vingt-quatre, à tel point que nous ne faisons presque plus de différence entre le jour et la nuit », témoigne Brahima.

Brahima Saye, habitant de Bandiagara

@PNUD Mali / Mohamed Diawara

Près de 60 ménages de déplacées internes ont été relocalisées dans un camp construit selon les standards internationaux permettant aux femmes et aux jeunes filles déplacées de vivre dignement, dans un environnement sécurisé et sain. Ces infrastructures construites offrent aux femmes des services de base qui leurs permettent d’être à l’abris de toutes violences et d’accéder l’eau et à la santé.

Nécessité d’impliquer les femmes

« Les travaux HIMO viennent à point nommé car à cause de l’insécurité, nous ne pouvons plus voyager. Avant, je me rendais à Bankass, à Borko et à Koro pour faire le marché. Nous avons dû cesser avec toutes ces activités. Nous avons peur aujourd’hui car plusieurs personnes que nous connaissons ont perdu la vie sur les routes. J’apprécie beaucoup ce travail car ça m’a remis sur pied », explique Aminata Ouologuem, agent de curage des caniveaux.

Le projet s’aligne avec le cinquième objectif du développement durable (ODD5) dédié à l'autonomisation des filles et des femmes, et correspond au marqueur du Genre 3 selon la classification du PNUD qui vise la transformation positive des vies de femmes.

Dans sa mise en œuvre, le projet a connu quelques réalisations phares avec un impact sur les vies des femmes durant l’année 2022. Ainsi, sous le haut parrainage du gouverneur de la région de Bandiagara, le PNUD, en collaboration avec la CAFO (Coordination des Associations Féminines et ONG du Mali), les faitières d`organisation de femmes, le service local de la promotion de la femme et les autorités locales, a remis à 45 groupements de femmes et jeunes (dont 90% de femmes) des équipements agricoles d’une valeur de plus de 148 millions FCFA (soit environ 240 000 USD) pour leur autonomisation ainsi que la relance économique. Les représentants de ces groupements avaient reçu des formations sur les techniques de production, l’entrepreneuriat féminin, le réseautage et le marketing.

« Je suis vraiment contente du nombre élévé des femmes dans les activités du projet de stabilisation car la crise nous avait empêché de mener des activités en dehors de la ville. Tout était en arrêt. L’inclusion des femmes déplacées a permis la cohabitation entre les déplacés et les populations hôtes. Presque tous les jeunes hommes et femmes sont en activité et cela est entrain de réduire considérablement les problèmes d’insécurité, lesquels sont aussi liés à la pauvreté », affirme Oumou Telly, membre de la CAFO à Bandiagara.