Innovation et finance locale: Digitalisation de la gestion des ressources communales

15 juin 2023
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Les avancées technologiques peuvent permettre aux autorités communales de collecter des données plus précises et en temps réel, ce qui peut contribuer à l’amélioration des recettes fiscales.

© PNUD Mali

Contexte de la décentralisation et mobilisation des ressources locales

Depuis 1992, le Mali a opté pour une politique de réforme de la gestion publique fondée sur la décentralisation qui devrait favoriser une meilleure gestion de proximité des affaires publiques d’intérêt local. Cette évolution sensible du paysage institutionnel local s’est concrétisée par une plus grande autonomie de gestion financière et administrative des communes. Mobiliser et gérer les ressources financières constituent dès lors des piliers de l’action des collectivités locales pour un développement local durable, orienté sur la fourniture des services de base de qualité et l’amélioration des conditions de vie des citoyens communaux. Toutefois, avec l’évolution, le constat général qui est fait révèle que les capacités financières des communes restent faibles. Les ressources transférées par l’État aux communes (La taxe de développement régionale et locale (TDRL), les contributions de patente, les contributions de licence, la vignette synthétique, la taxe de marché (droits de place sur les marchés), la taxe sur les sorties de véhicule, la taxe sur les débits de boisson et gargotes, la taxe sur les autorisations de construire) qui sont inscrits dans le Code Général des Impôts (CGI) ou institués par délibération du conseil communal ne sont pas recouvrées à souhait car entaché d’irrégularité.

Au regard de la situation actuelle, quelles alternatives pour améliorer les recettes fiscales dans les communes ?

A la recherche de solution alternative pour améliorer les recettes communales, certaines communes ont procédé à une gestion déléguée de leur marché ; ce qui est d’ailleurs une pratique courante aujourd’hui. Elle consiste à confier la gestion d’un marché à un tiers afin de bénéficier d’une expertise et d’une efficacité supérieure tout en réduisant leurs coûts de fonctionnement et en améliorant leur transparence et leur responsabilité. Ce modèle de gestion est censé réduire les irrégularités en améliorant les recettes fiscales de la commune. Bien que la gestion déléguée soit une option, il convient de chercher à savoir dans quelle mesure l’innovation numérique pourrait renforcer notre action en faveur d’un recouvrement transparent des taxes de développement ? 

Vers une solution innovante de recouvrement des droits de place sur les marchés : « Salen ».

L’innovation, peut avoir un impact sur la façon dont les taxes sont recouvrées et gérées. Les avancées technologiques peuvent permettre aux autorités communales de collecter des données plus précises et en temps réel, ce qui peut contribuer à l’amélioration des recettes fiscales. Lors du hackathon organisé par le laboratoire d‘accélération du PNUD Mali sur la gouvernance, une startup a travaillé sur les taxes de marché à l’instar des autres taxes de développement en vue de contribuer à un recouvrement transparent de cette taxe. Ce fut un processus d’apprentissage accéléré autour de cette expérience. Au cours de ce travail préliminaire, j’ai appris davantage que le recouvrement des taxes en général et spécifiquement celles relatives aux droits de place sur les marchés est entaché d’irrégularité Notons que cette taxe est recouvrée manuellement autrement dit l’agent de collecte passe d’un marchand à l’autre pour percevoir l’argent et délivrer un ticket qu’il écrit à la main. Pour pallier ce défi, une startup a proposé une application dénommée ‘’salen’’ en langue bambara qui signifie taxe de marché. Cette application est composée d’un smartphone et d’une mini imprimante intégrée, le tout connecté au serveur de la mairie. Après une période dédiée au développement de l’application, nous voilà en route pour Koulikoro où nous voulions la tester avec la Mairie de la commune urbaine. A la suite des procédures administratives, nous avons formé quelques agents de la Mairie notamment les recouvreurs, comptable et secrétaire général sur le fonctionnement de l’application et procéder à son test auprès d’une centaine de vendeurs installés en dehors du marché vu que la gestion du marché était déléguée. Les vendeurs ont d’abord été recensé et enregistré dans le smartphone. Ainsi les agents de collecte ont été doté de l’application Salen avec lequel ils faisaient la collecte des taxes auprès des marchands enregistrés. Chaque fois qu’un ticket était donné, il était aussitôt renseigné dans la base de données de la Mairie, ce qui permettait de vérifier au cas par cas et la recette journalière. Au terme du test, nous appris qu’aucune irrégularité n’avait été constaté dans la mesure où la Mairie pouvait suivre quotidiennement la délivrance des tickets et la recette journalière. 

Vers une intégration de toutes les taxes de développement

Le test effectué en partenariat avec la Mairie de la commune urbaine de Koulikoro concernait les droits de place sur le marché pour lequel l’application a été conçue. Considérant que l’application pourrait aider à améliorer les recettes des collectivités, la Mairie a recommandé d’intégrer toutes les taxes de développement local ci-dessus mentionnées. 

En effet, si nous voulons contribuer à l’amélioration de la gouvernance, nous devrions aussi explorer d’autres pistes de solution telles que les innovations et la digitalisation pour renforcer notre intervention et répondre aux défis complexes de notre époque. Dans ce cas de figure, les lauréats du hackathon sur la gouvernance sont à pied d’œuvre pour intégrer les différentes taxes de développement local afin de contribuer à l’amélioration de la gouvernance locale.

Issa BAMBA, responsable de l’expérimentation au Laboratoire d’Accélération du PNUD Mali.