Et si les passions-folies étaient la véritable clé du développement !

2 novembre 2020

M. Olivier Paré en pleine séance de partage d'expérience. Crédit photo : PNUD/Burkina

« On ne développe pas, on se développe » cette assertion du Pr Joseph Ki-Zerbo nous interpelle et nous fait réfléchir constamment au point où l’on se demande souvent comment traduire cela en action. Des bribes de réponses commencent à germer avec la cartographie des solutions locales innovantes. Alors quoi de plus normal qu’un producteur de fourrage et de cultures céréalières, en la personne de M. Olivier Paré, parle à ses paires de ses expériences, de son vécu avec ses mots et des résultats concrets à l’appui. Il n'est point de secret que les principales activités économiques de la majorité des pays du Sahel particulièrement au Burkina Faso sont constituées de l'élevage et de l'agriculture. L’élevage occupe 86% de la population (cf. http://www.fao.org/3/CA2654FR/ca2654fr.pdf, page 1) et est pratiqué en trois types soit extensif ou traditionnel, semi-moderne ou semi-intensif et intensif ou moderne (embouche commerciale) mais le plus dominant demeure l’élevage extensif ou traditionnel (cf. http://www.fao.org/3/ca4952fr/ca4952fr.pdf, page 10).   L’élevage traditionnel voire extensif consiste à un fort déplacement des éleveurs avec leurs animaux à la recherche de pâturage. Les animaux n’ont pas ou peu d’habitat. C’est un élevage qui ne reçoit généralement pas de de complément alimentaire en dehors des herbes naturelles d’où la transhumance des éleveurs au gré des zones offrant plus de pâturage.

Oui ! « on se développe » ! et la justesse de cette assertion passe par des hommes et femmes passionnés des questions de développement de leurs communautés, qui osent sortir des chemins battus pour vivre pleinement leurs « folies » au bénéfice de l’épanouissement des leurs voire de toute la nation. Comme cet autre auteur qui disait préférer « vivre dans le rêve car de là lui vient l’énergie de réalisation des folies ». Cette passion-folie pousse les personnes qui en sont touchées à combiner la recherche et l’expérimentation en passant par l’endurance de l’échec et la reconnaissance de la communauté. En cela aussi Oliver Paré est un témoignage vivant. Autodidacte, il développera la solution de « l’agriculture intégrée du fourrage » pour répondre à un problème majeur de la lutte contre la divagation des animaux : la disponibilisation du fourrage à toute saison de l'année. Dès lors, cela favorise non seulement leur stabulation, contribue aussi à l'amélioration de l'agriculture à travers la fertilisation des sols avec les bouses des vaches collectées mais surtout améliore les revenus des acteurs de ces secteurs.  Ce désir, de trouver des moyens de nourrir les animaux, lui est né à la suite d’un conflit entre agriculteur-éleveur ayant entrainé des pertes en vies humaines dont un ami à son père.

La région de la Boucle du Mouhoun, dont est originaire M. Olivier Paré, est considérée comme le « grenier du Burkina Faso » du fait de l’importance de la production céréalière. Cette région connait aussi une pratique très importante d’élevage traditionnel de bovins et ovins.  Le couple Agriculture/Elevage bien que complémentaire reste conflictuel au regard de la prédominance du type d’élevage pratiqué, de l’augmentation de la population et de la rareté des terres.  Cet état de fait provoque beaucoup de conflits sociaux avec leur corollaire de conséquences multiples dont l’enrôlement de certains individus dans le terroriste par soucis de vengeances.

Au regard de ses multiples avantages, la solution de M. Paré Olivier qui combine une agriculture à la fois pour les humains et pour les animaux, s’avère une solution idoine pour la paix et la cohésion sociale. Ainsi, les populations principalement les agriculteurs/éleveurs et autres parties prenantes, non seulement apprennent avec lui une nouvelle culture innovante combinant céréales et fourrage mais aussi remettent en cause leurs perceptions et habitudes d’élevage en pensant à comment renforcer la cohésion sociale en leur sein. Ce type d’agriculture produit aussi plusieurs externalités positives telle la régénération des sols, la protection des berges, le renforcement de la sécurité alimentaire à travers l’amélioration de l’élevage et l’augmentation des quantités de céréales récoltées. Elle contribue aussi à la création d’emplois pour les jeunes et les femmes à travers la maitrise et la vente de la production fourragère. La maîtrise de la production fourragère permet de rendre disponible différentes variétés de fourrage pour les animaux à tout moment de l’année.

Une des leçons également à retenir est la réceptivité des autres agriculteurs/éleveurs de cette technique. Le promoteur qui leur parle est un des leurs, qui a réalisé ses expériences avec l’appui de chercheurs sur des variétés connues. Il est convaincant d’autant plus qu’il n’a pas recours à des intrants extraordinaires mais juste de l’existant local : la fumure organique. Toute chose qui lui a valu l’obtention de nombreux prix, lui faisant ainsi passer de « fou » à « expert », pétri de savoirs.

 Cette innovation mise en lumière est rendue possible grâce à l’engagement du PNUD aux cotés des populations pour la recherche de solutions locales innovantes, gage d’un développement approprié et durable !