Suivre les « cas manquants » de tuberculose au-delà des frontières

18 mars 2022

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En Afghanistan, des décennies de conflit, de pauvreté, de catastrophes naturelles et de sécheresse ont poussé de nombreuses personnes à quitter le pays. Près de six millions d'Afghans ont émigré vers les pays voisins, parmi lesquels plus de 2,2 millions de réfugiés ont été recensés en Iran et au Pakistan. En outre, en 2020, 850 000 personnes sont retournées en Afghanistan depuis l'Iran et le Pakistan.

Cela pose un problème de santé publique. L'Afghanistan et le Pakistan présentent tous deux des taux élevés de tuberculose (TB). L'Iran présente des taux comparativement plus faibles, mais on estime que les migrants afghans représentent un cas sur cinq dans le pays.

Assurer la bonne santé des populations déplacées est un exercice délicat. La subvention multi-pays du Fonds mondial de lutte contre la tuberculose en Asie vise à détecter et traiter les cas de tuberculose parmi les populations mobiles en Afghanistan, en Iran et au Pakistan.

Il est difficile de détecter et de traiter les nouveaux cas de tuberculose parmi les populations mobiles ; beaucoup d'entre elles ne sont pas recensées et n'ont pas de papiers, de plus, la stigmatisation liée à la tuberculose reste élevée. Même si ces personnes sont déclarées, elles peuvent passer entre les mailles du filet, les conditions de vie, le statut socio-économique et l'accès limité aux soins de santé constituent des obstacles pour les services de lutte contre la tuberculose. Il est très probable que de nombreux cas de tuberculose échappent aux systèmes de santé parmi les populations afghanes mobiles de ces trois pays couverts par la subvention du Fonds mondial. Ces cas doivent être détectés et pris en charge afin d'éviter la propagation de la maladie, notamment des formes résistantes aux médicaments.

La subvention du Fonds mondial gérée par le PNUD vise à renforcer la collaboration et le partage d'informations entre l'Afghanistan, l'Iran et le Pakistan afin d'assurer la continuité des soins pour les patients qui se déplacent d'un pays à l'autre. 

Dans le cadre de ce travail, le PNUD a soutenu le déploiement d'une plateforme numérique transfrontalière enregistrant et signalant les cas de tuberculose parmi les réfugiés, les rapatriés et les populations mobiles. Cette plateforme a été conçue en partenariat avec les programmes nationaux de lutte contre la tuberculose, le Fonds mondial, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et d'autres organisations.

La plateforme a été développée par Dure Tech et s'appuie sur la plateforme numérique de prévention de la tuberculose de l'OMS. Elle se fonde sur une technologie open-source et comprend un module centré sur le patient, ainsi qu'une interopérabilité intégrée avec les systèmes d’information médicale, permettant de suivre les patients tuberculeux à travers le continuum de soins et au-delà des frontières. 

La plateforme est chargée de traiter les questions suivantes : 

  • Vie privée et confidentialité : la plateforme utilise un code d'identification unique qui permet aux services de santé de chaque pays de suivre les patients tout en préservant leur confidentialité.
  • Suivi des personnes au-delà des frontières : le transfert d'informations entre différents systèmes d'information médicale peut s'avérer difficile. La plateforme permet de transférer facilement les données entre les pays. Ainsi, n'importe quel établissement de santé peut savoir quel traitement un patient a suivi dans un autre pays, voir s’il présente d'autres problèmes de santé, etc.
  • Risque de perte de patients au cours du déplacement : le transfert des données d'un patient n'est automatique que dans la mesure où il informe son établissement de santé de son déplacement. Des services de conseil sont nécessaires pour s'assurer qu'ils informent de ce changement.

Un essai sur le terrain réalisé fin 2021 a confirmé que l'application fonctionne en conditions réelles. La formation des formateurs et des agents de santé sur le terrain dans 11 sites est terminée et le matériel informatique est en cours de distribution. La plateforme passe maintenant à sa deuxième phase qui concernera 12 sites en Afghanistan (4 points de passage frontaliers et 8 établissements pour personnes déplacées à l'intérieur du pays), 11 centres de soins contre la tuberculose en Iran et 45 villages de réfugiés au Pakistan.

Un effort soutenu, des investissements et une approche fondée sur le partenariat sont essentiels pour garantir la mise à l'échelle de la plateforme développée dans le cadre de la subvention multi-pays du Fonds mondial. Celle-ci permettra de recenser le plus grand nombre possible de « cas manquants » de tuberculose, contribuera à accélérer les progrès vers la réalisation des ODD liés à la santé et à ne laisser personne de côté.

 

Conformément au Plan stratégique 2022-2025 du PNUD et à sa stratégie VIH et santé 2022-2025 : Établir des liens - Vers un avenir plus équitable, plus sain et plus durable, le PNUD s'associe au Fonds mondial, aux gouvernements et à la société civile pour soutenir et renforcer les réponses nationales multisectorielles au VIH, à la tuberculose et au paludisme, en fournissant un soutien intégré aux politiques, aux programmes et au développement des capacités.

La Journée mondiale de lutte contre la tuberculose est célébrée chaque année le 24 mars afin de sensibiliser le plus grand nombre à l'épidémie mondiale de tuberculose et aux efforts déployés pour éliminer cette maladie. Le thème de la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose 2022, « Investissons pour en finir avec la tuberculose, sauvons des vies », met en évidence le déficit de financement actuel de 9 milliards de dollars qui menace d'entraver les progrès mondiaux dans la lutte contre la tuberculose, et appelle les dirigeants mondiaux à intensifier leurs efforts et à tripler ou quadrupler le financement pour sauver des vies et mettre fin à la tuberculose d'ici 2030.